La difficile, si difficile réalité du pouvoir

Day 938, 11:43 Published in France France by Ivan Dusaiks

Depuis dix jours, nous avons un nouveau président, et un nouveau chargement de ministres. Comme dirait l'autre, cela est bel et bon, et le peuple, fou de joie de son choix judicieux, s'emballe comme jamais face à tout ce qui lui est gracieusement concédé. Du moins, en théorie.

Notre cher président nous avait promis des batailles, de la gloire, du sang virtuel sur les mains, et des projets à la démesure de son modeste ego, et tout ceci devait commencer en fanfare, « tambour en tête », comme on disait alors. Il fallait envahir la Suisse, conquête utile s'il en est, envahir le Canada, puis déborder par le monde, en passant par les états-unis, la Chine, l'Inde, avant de se reposer pour terminer en Grèce. Mais, en se prenant pour Alexandre le Grand, notre président est devenu Cendrillon, quoique en moins futé.

Alors, où est donc passée notre foutue pantoufle ? Parce qu'il ne faudrait pas que la France soit en retard au bal !

Entre temps, la réalité du pouvoir semble avoir fait son œuvre, un peu comme on se rend compte un jour qu'on ne sera ni millionnaire, ni riche, ni beau, ni président du Rotary Club, parce qu'en dépit de nos hautes ambitions et de notre envie datant au moins de la dernière seconde d'en être, non, ni les événements, ni le vaste public, ni qui que ce soit d'autre ne nous feront de cadeau. Eh oui, la vie, c'est dur. Selon toute vraisemblance, tel un emo en phase extatique devant Tokio Hotel, notre cher président ne fait rien, strictement rien, parce qu'il déprime et a pris conscience que tout ne lui serait pas servi sur un plateau d'argent, que la réalité se pliait rarement à ses désirs, et qu'enfin, les gens n'étaient pas tous là pour plier le genou face à sa toute-puissance. Car oui, même dans un jeu, rien ne nous est offert.

Comme tout bon emo dépressif, notre président se cache, il évite la lumière, et les questions dérangeantes qui pourraient lui être posées, non seulement sur son teint blafard, mais aussi sur ses activités, parce qu'être là mais se planquer, c'est pouvoir dire qu'on agit dans l'ombre, si toutefois soupirer, c'est agir, bien qu'il faille éviter d'en révéler un peu trop. Comme tout bon emo à la fougue brisée, notre président se montre d'autant plus agressif que sa frustration est des plus évidentes, et nos chers congressistes, qui l'avaient acclamé parce qu'au moins, il leur foutrait la paix, en font aussi les frais. Enfin, comme tout bon emo frustré à qui l'on donne le bouton rouge, notre président se venge sur le monde cruel et injuste qui l'entoure en tirant la queue du chat et en faisant exprès de marcher 'par accident' sur les pattes du chien (mais si, il était dans le passage !), ce qui, ici, se traduit entre autres par l'exclusion unilatérale d'un de nos alliés de notre propre alliance.

Car saviez vous que d'après notre emo-président, l'Ukraine était notre ennemi, et que, parce qu'ils ont eu par le passé l'outrecuidance d'avoir des accointances avec nos ennemis, ou plutôt avec les ennemis de phoenix, ils étaient des parasites indésirables qui se verraient retiré tout accès à la documentation dite secrète ? Entre nous, je ne sais pas s'il faut en rire ou s'en sentir accablé, mais puisque nous avons le choix, alors autant en rire, et faire œuvre pour l'humanité toute entière en nous remémorant du comportement passé de la France : soumission, trahisons, chaudes larmes, apitoiement, humiliation ; il est vrai qu'au regard de nos états de service, nous ne pouvons que nous ériger une statue, nous faire le mémorial agissant d'une éthique à l'exemplarité sans faille. Juger une toute une nation pour ses préférences passés, ou quand le ridicule s'incarne politique.

Le plus regrettable, c'est que tout ceci était prévisible, et que c'est justement parce qu'une telle attitude, une telle passivité agressive et morbide, étaient des attendus, qu'il faut être consternés. Point n'est besoin de revenir trop longuement sur les élections de juin, mais il est clair que aguellid était le candidat soutenu par l'aristocratie du congrès qui a su et compris qu'élu, il ne ferait rien, absolument rien, et encore moins menacer leur petit pré carré. En agitant les craintes, ils ont finement joué, parce que du résultat du scrutin dépendait le devenir effectif du partage des pouvoirs en France. La preuve est faite que, quel que soit le contexte, tout système qui persiste assez longtemps finit par être dirigé par la médiocrité, et des médiocres purs, qui ne feront pas d'ombre à la réalité de l'exercice du pouvoir.

Ce mois-ci donc, nous avons gagné un faible et un pantin, élu par un peuple qui, au dire de la majorité, n'a, je cite, « pas la lucidité nécessaire pour prendre de bonnes décisions ». Pas digne d'être consulté sur tous les grands enjeux. Et le pire, c'est qu'avec un emo-président en tête du carnaval, la tentation d'en affirmer l'exactitude est forte.

Alors, que faire, me dira-t-on ? Rien, autant ne rien faire, si ce n'est, non pas s'en indigner, mais en rire, parce que tout ceci est fondamentalement drôle. La présidence, qui n'est, sur erepublik, que pouvoir d'animation, faite enjeu quasi vital par une poignée de mecs qui s'imaginent avoir l'intelligence de diriger le pays tout en faisant l'éloge de la médiocrité, c'est au-delà des mots, c'est une pure émotion, et elle est très jouissive.


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